Endettement France : quel président en est responsable ?

La dette publique française s’élevait à 21 % du PIB en 1980. En 2023, ce ratio dépasse 110 %. Aucun président de la Ve République n’a terminé son mandat avec une dette inférieure à celle de son prédécesseur.

Certains chefs de l’État ont bénéficié d’une croissance soutenue ou de taux d’intérêt favorables, d’autres ont dû affronter des crises économiques ou sanitaires majeures. Les politiques budgétaires, les choix d’investissement, les réformes et les cycles économiques successifs ont contribué à façonner l’évolution de l’endettement national. Les chiffres retracent l’impact concret de chaque quinquennat sur la trajectoire de la dette.

Comment la dette publique a évolué sous la Ve République

Remonter la pente de la dette publique en France, c’est suivre un sentier semé d’embûches et de virages imprévus. Les statistiques de l’INSEE et de la Cour des Comptes mettent en lumière une dynamique continue, marquée par des à-coups, des accélérations soudaines et de vrais coups d’arrêt. En 1980, la dette de l’État ne représentait qu’une faible part du produit intérieur brut (PIB) : 21 %. Mais la fin du siècle a vu la barre symbolique des 60 %, imposée par le Traité de Maastricht, être franchie à grande vitesse par l’Union Européenne.

La décennie 2000 a été le théâtre d’un emballement inédit. La crise financière de 2008 a creusé les déficits : en moins d’un quinquennat, le ratio dette/PIB a bondi de 64 % à 93 %, selon l’INSEE. Plans de sauvetage, recettes fiscales en chute libre, croissance étouffée : la dette a progressé à marche forcée.

La décennie suivante n’a pas permis de freiner la cadence. En 2014, le cap des 2 000 milliards d’euros est franchi. Puis la pandémie accélère le mouvement : la dette dépasse les 3 000 milliards en 2023, soit plus de 110 % du PIB. Malgré quelques phases de croissance ou de rigueur, la courbe ne s’est jamais réellement infléchie.

Voici les étapes marquantes de cette progression :

  • 1980 : 21 % du PIB
  • 1992 (Maastricht) : 40 %
  • 2008 : 64 %
  • 2014 : 95 %
  • 2023 : 110 %

Cette évolution contraste avec le parcours de certains voisins européens. Entre politiques d’austérité, choix économiques divergents et conjonctures mondiales, la France s’est retrouvée en difficulté pour contenir sa dette publique.

Quels présidents ont marqué des ruptures dans la trajectoire de l’endettement ?

L’ascension de la dette publique sous la Ve République n’a rien d’un long fleuve tranquille. Chaque président a laissé une empreinte particulière, prise entre stratégie politique et aléas mondiaux. Valéry Giscard d’Estaing enclenche la modernisation, mais la véritable accélération survient avec François Mitterrand : nationalisations, relance, politiques de rigueur, la dette dépasse 30 % du PIB à la fin de ses mandats.

Avec Jacques Chirac, l’ambition de redresser les finances publiques se heurte à la montée du chômage et au poids des dépenses sociales. Même avec l’objectif du Traité de Maastricht, la France dévie rapidement de la trajectoire européenne, franchissant la barre des 60 % du PIB.

L’arrivée de Nicolas Sarkozy coïncide avec la tempête financière de 2008. Plans de soutien, relance massive : la dette s’envole, gagnant près de 30 points en cinq ans. François Hollande tente de contenir la progression par une politique fiscale plus stricte et une réduction des dépenses, mais la tendance ne s’inverse pas.

Le quinquennat d’Emmanuel Macron commence sur une note de croissance, vite balayée par la pandémie. Les mesures d’urgence, ce « quoi qu’il en coûte », font franchir à la France le seuil historique des 3 000 milliards d’euros, plus de 110 % du PIB en 2023. À chaque étape, la France a dû jongler avec un héritage complexe et affronter des défis uniques.

Facteurs économiques et contextes internationaux influençant la dette

La trajectoire de la dette publique française s’est forgée au gré des turbulences économiques. Le choc pétrolier des années 1970 a forcé l’État à dépenser sans compter pour limiter la casse sur la croissance. Sous la pression des crises mondiales, la France a multiplié les déficits en tentant de préserver l’emploi, ce qui a creusé la dette.

Les années 2000 ont été frappées par la crise des subprimes. Le sauvetage du secteur bancaire et les plans de relance ont coûté des centaines de milliards d’euros supplémentaires. À l’échelle européenne, les règles budgétaires du Traité de Maastricht n’ont pas suffi à freiner la hausse du ratio dette/PIB.

La Banque centrale européenne a longtemps allégé la charge de la dette grâce à des taux d’intérêt exceptionnellement bas. Depuis 2022, la remontée des taux renchérit le service de la dette : chaque point grignote des milliards d’euros sur le budget annuel.

Plusieurs facteurs pèsent lourdement dans la balance :

  • Des taux de croissance peu dynamiques qui réduisent les recettes fiscales et compliquent la réduction de la dette.
  • Des crises sanitaires ou géopolitiques, de la pandémie à la guerre en Ukraine, qui nécessitent des dépenses publiques massives.
  • La dépendance aux marchés financiers, qui expose la France à la volatilité des conditions de financement.

Chaque année, Bercy doit composer avec ces contraintes, cherchant à maintenir un équilibre fragile entre le financement de l’action publique et la pression de l’augmentation de la dette.

Comprendre les enjeux actuels de l’endettement à la lumière du passé présidentiel

La dette publique, sous l’œil attentif de la Cour des Comptes et des économistes, échappe à toute explication simpliste. Derrière chaque courbe, il y a des arbitrages, des choix de dépenses publiques et une gestion des déficits marquée par les priorités politiques et les aléas économiques.

À l’heure actuelle, la question de l’équilibre entre dépenses et recettes devient brûlante. Les retraités, les agents publics, les entreprises, tous s’inquiètent de la viabilité d’une dette qui dépasse les 3 000 milliards d’euros, avec un ratio supérieur à 110 % du PIB. François Bayrou, haut-commissaire au Plan, pointe du doigt les dérapages de la dépense publique et appelle à plus de responsabilité. Pierre Moscovici, président de la Cour des Comptes, insiste sur l’urgence des décisions structurelles pour éviter la saturation budgétaire.

Qui, de l’Assemblée nationale à Bercy, assume la trajectoire ?

La gestion de la dette cristallise les débats et les positions tranchées :

  • L’Assemblée nationale débat fermement de la maîtrise des dépenses de l’État. Patrick Martin (Medef) et Valérie Pécresse réclament des réformes de fond pour redresser la barre.
  • Eric Woerth et Gilles Carrez mettent en avant la nécessité d’une stratégie solide pour stopper la progression de la dette.

À mesure que les contraintes des marchés financiers s’intensifient et que la croissance s’essouffle, le débat public s’échauffe sur la répartition des efforts à fournir. La France se retrouve devant un carrefour stratégique, scrutée de près par les institutions indépendantes. Reste à savoir si la prochaine décennie apportera enfin une inflexion, ou si le compteur continuera de s’emballer.

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